Cher tous,
 
Après réflexion, je me sens dans l'obligation de te répondre dans le sens d'une critique constructive, et non pas dans la boutade facile de ma réponse précédente... je m'en excuse, car je l'ai écrite dans le métro sur un coup de tête depuis mon smartphone!
 
Et j'aimerais d'emblée que l'on dépasse le débat sur l'ethnocentricité, qui est stérile et réductrice à mon sens. La question n'est pas de contester la légitimité de Barthes d'écrire sur le Japon, ni notre légitimité de ne pas le critiquer en tant qu'Orientaux connaissant "mieux" l'Orient qu'un français.
 
Les réflexions que tu soulèves reflètent très certainement les discussions qui ont eu lieu lors des séances précédentes. Mea cupla, je n'étais pas présent la dernière fois, mais je me souviens de ce sentiment de discussion inachevée lors de la première lecture commune.
 
J'avais, je me souviens, adopté une position très critique sur le fond du texte, et remis en question la pertinence intellectuelle voire littéraire des descriptions de Barthes sur la ville de Tokyo, la gare, etc. D'un point de vue des théories urbaines, ce texte me semble en effet un peu léger, et il le serait de même du point de vue ethnographique, au regard de notre connaissance du Japon contemporain. Nous avions alors évoqué des tendances d'Orientalisme dans cette écriture du récit du voyage.
 
Pour aller dans ton sens sur comprendre "pourquoi l'auteur a-t-il voulu écrire cela", je me suis un peu plus penché sur la question, et après quelques recherches sur internet, voici un commentaire qui me semble enrichissant pour dépasser notre débat et permettre une critique constructive. Peut-être que Le Pigeonnier peut-il l'imprimer pour la discussion de ce soir?
 
http://www.era.lib.ed.ac.uk/bitstream/1842/651/2/LIRE.pdf 

En référence à ce texte, je propose la lecture suivante de "L'Empire des Signes":
 
- il faut le replacer dans une certaine tradition de l'Orientalisme, qui peut remonter jusqu'à Voltaire ou Marco Polo
- Barthes adopte volontairement le style narratif du voyageur, avec les figures de style et effets de découverte, d'étonnement et de mystification que permettent l'Orientalisme et l'exotisme
- de ce fait, Barthes, en transportant le lecteur (français) dans l'imaginaire commun des occidentaux sur l'Orient, peut "sublimer" les rapports du signe et du signifiant. Il a trouvé un terrain "vierge" pour illustrer un monde rempli de signes, et en quelque sorte conforter sa théorie sur la sémiologie. .
- d'ailleurs, Barthes le dit si bien dans sa première page: le Japon est un prétexte d'écriture avant tout, non pour exprimer une critique ou construire un essai, affirmer une vérité quelconque.
- en adoptant le style du récit de voyage, Barthes se livre à un exercice d'écriture et offre une invitation de "lire" un monde où tout est signe et symbole, et où tout Occidental est "perdu" de toute manière: d'une manière subtile et magistrale, il joue avec le mythe le plus répandu chez les Occidentaux à savoir la mystique de l'Orient incarné par le Japon.
- Il se libère ainsi des contraintes de devoir se justifier sur une culture dont de toute manière il ne maîtrise pas les signes...
- ce texte date de 1970, qu'il convient de situer dans l'histoire intellectuelle de l'époque. après avoir publié 20 auparavant "Mythologies", Barthes avait sans doute-t-il besoin d'un autre appui que purement théorique, pour compléter son oeuvre?
 
Pour rejoindre une remarque de Hailun, au-delà de la question de la sémiologie et ou de l'apport ethnographique sur le Japon, la valeur de ce texte est sans doute et surtout littéraire.
 
Martin

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